La Suisse : premier pays d’expatriation française.

Selon les chiffres du ministère des Affaires étrangères, le nombre d’expatriés français a encore augmenté de 2% en 2015 par rapport à l’année précédente pour atteindre 1,7 millions de personnes, soit une hausse de 4,14% sur deux ans. Ce chiffre concerne plus précisément les Français inscrits sur des listes consulaires à l’étranger. Avec des disparités notables: au Congo, Mali et Algérie aurait bondi en 2015 par rapport à 2014 avec des augmentations respectives de 19%, 14% et 12%. La population de Français en Suisse, pays où ils sont le plus nombreux, a progressé de 5% pour atteindre 175 700 personnes. De même, au Canada, les Français étaient en 2015 quelque 92 116 (+6%). En revanche, le nombre d’expatriés en Espagne et en Italie a reculé en 2015.

«Il faut manier ces données avec précaution dans la mesure où elles varient en raison de l’augmentation d’inscriptions sur les listes consulaires (facultatives NDLR) et non pas simplement en raison de la hausse du nombre d’expatriés», modère cependant Hervé Heyraud, président fondateur des éditions du Petit Journal, le quotidien de référence des Français de l’étranger.

«L’augmentation d’expatriés français sur les listes consulaires de tous les pays de la zone sahélienne est directement liée à des questions de sécurité. Les Français préviennent qu’ils sont là», indique Jean-Christophe Dumont, chef de la division des migrations internationales à l’OCDE. C’est à l’occasion d’une naissance ou d’élections que l’on voit également les inscriptions d’expatriés s’accélérer.

Quoiqu’il en soit, on observe depuis plusieurs années que les départs vers l’étranger des personnes nées en France se sont réellement amplifiées.

Les dernières données de l’Insee, montrent qu’entre 2006 et 2013, le nombre de personnes nées en France partant pour l’étranger a progressé de 5,2% par an en moyenne. En 2013, près de 197.000 personnes nées en France ont quitté le territoire, soit 59.000 de plus qu’au cours de l’année 2006. Parallèlement, les retours des personnes nées en France sont stables, autour de 78.000 personnes.

De ce fait, le solde migratoire des personnes nées en France est passé de – 60.000 à – 120.000. «Il n’y a pas matière à s’inquiéter outre mesure pour le moment mais il est intéressant d’y porter une attention particulière. Il faudrait s’alerter si l’on voyait une grave diminution du taux de retour ou un allongement de la durée moyenne de séjour ou encore une augmentation des naturalisations des Français à l’étranger», commente Jean-Christophe Dumont.

Phénomène de globalisation ou de fuite

Pour comprendre ces flux, et donc les maîtriser, il faut donc connaître ce qui pousse les Français à s’expatrier: «participation à la globalisation ou phénomène de fuite», interroge le démographe. D’après l’Insee, en 2013, 80 % des départs à l’étranger de personnes nées en France ont concerné des personnes entre 18 et 29 ans, âges d’études ou de début d’activité. «On est dans un processus de globalisation du marché du travail et des études. Les employeurs donnent la priorité aux candidats maîtrisant les langues étrangères et qui possèdent également une expérience à l’international.

La difficulté aurait été d’observer un phénomène contraire», estime Jean-Christophe Dumont. Mais selon une étude sur les Français à l’étranger réalisée par la Chambre de commerce et d’industrie de Paris et parue en mars 2014, chômage et morosité poussent également les jeunes au départ à l’étranger. Côté fiscalité, même si quelques centaines de personnes seulement fuient effectivement un taux d’imposition trop élevé, ces départs engendrent de grosses pertes de revenus pour l’Etat français.

Aujourd’hui, le nombre d’expatriés français est estimé à environ 2 millions. L’immatriculation au consulat étant facultative, il n’existe pas de chiffres réels sur la question mais uniquement des estimations. D’ici les présidentielles de 2017, les chiffres seront affinés. Quant à l’inscription en ligne sur les listes consulaires, elle sera prochainement possible, ce qui augmentera probablement les inscriptions. «Connaître les expatriés permettrait de mieux répondre à leurs besoins et maintenir le lien avec eux. Et puis, il y a un véritable enjeu de rayonnement de la culture française à l’étranger. Chaque expatrié est un ambassadeur», estime Hervé Heyraud.